Philip Nunn
Armenia, Colombie
Octobre 2003
source :
www.philipnunn.com
Nous ne contrôlons pas
grand-chose de ce qui se passe autour de nous. Nos réactions aux
événements de la vie semblent refléter nos expériences précédentes et
nos attentes. Que ressentez-vous quand vous rendez visite à des
personnes malades à l'hôpital ? êtes-vous remué au-dedans de vous
lorsque vous voyez une grande pauvreté et une grande misère à la
télévision ? Comment réagissez-vous émotionnellement envers ces
chrétiens qui agissent différemment de la manière dont vous le feriez
normalement ? Comment vous sentez-vous quand vous vous trouvez blessé
par ce que d'autres vous ont fait ? Nos réactions émotives dans de
telles circonstances mettent à nu notre système fondamental de valeur.
Quelles émotions Jésus a-t-il montrées ?
De tous les évangiles,
l’évangile de Marc est peut-être celui qui rapporte le mieux certaines
des réactions émotionnelles de notre Seigneur Jésus. Ces émotions, je
pense, nous ouvrent une fenêtre sur son cœur. Elles nous montrent ce qui
est important pour lui et ce qu’il désapprouve fortement. Elles nous
exposent son système de valeur. Comme nous le savons, Jean Marc, qui est
probablement l’auteur de cet évangile, n'était pas l'un des douze
disciples du Seigneur1. Quand il était jeune homme, il a
sûrement dû habiter à Jérusalem avec sa mère Marie (Actes 12. 12, 25).
Il a probablement vu certains des miracles de son Seigneur et il a pu
apprécier une part de son enseignement. Il avait été suffisamment
impressionné au point de sortir en courant de nuit pour être témoin de
l'arrestation de Jésus (Marc 14. 51,52). Qu'a pu voir ce jeune homme des
souffrances de Christ avant de s’échapper ? Bien que nous associions
habituellement Jean Marc à Paul et à son oncle Barnabas ainsi qu’à son
échec lors d’un voyage missionnaire, nombre d'éléments bibliques et
tradition laissent suggérer un lien fort entre Jean Marc et l'apôtre
Pierre. Quand il a été libéré de prison, Pierre est immédiatement allé à
la maison de Marie, la mère de Marc, où les croyants s'étaient réunis
pour prier pour lui. Plus tard nous trouvons Marc avec Pierre à Rome, et
Pierre parle de lui en disant « et Marc, mon fils » (1 Pierre 5. 13).
L'apôtre Pierre doit être à l’origine d’une grande partie de ce qui est
rapporté dans l’évangile de Marc, au point que ce livre a été appelé
l'évangile de Pierre par quelques auteurs antiques. Bien que Pierre se
soit adouci dans ses dernières années, son caractère impulsif et
agressif était très différent de celui de notre Seigneur Jésus. Il
s’était sûrement rendu compte que les sentiments et les réactions du
Seigneur étaient souvent très différents des siens. Le Seigneur avait un
système de valeur différent. Étudions ceci de plus près.
1. Les
réactions de Jésus face à un monde dans le besoin
Avant que Marc n’ait
terminé son premier chapitre, un lépreux contagieux et malodorant se
jette au-devant de Jésus et le supplie : « si tu veux, tu peux me rendre
net » (Marc 1. 40). Du fait que nous habitons ici en Colombie, un pays
du tiers monde au chômage écrasant, nous recevons presque
quotidiennement des demandes d'aide financière d'un endroit ou de
l’autre. C’est émotionnellement fatigant. Personnellement, je
préférerais ne pas voir tant de besoins. Mais le Seigneur a éprouvé de
la compassion. Non pas « juste assez » pour laisser au lépreux
une pièce de monnaie. Il a été « ému de compassion ». Ce qui s’en
est suivi n'était pas une réponse froide et calculée par Jésus mais une
réponse dirigée par la compassion : « Et Jésus, étendant la main, le
toucha ». « Je veux » a t-il ajouté, « sois net ! » (Marc 1. 41). Plus
tard, en chemin vers la mer de Galilée, il rencontre « un sourd qui
parlait avec peine ». Ses amis ont supplié le Seigneur de le guérir.
Nous sentons ici combien le
Seigneur a compris et ressenti la situation difficile de cet homme sourd
et l'inquiétude de ses amis. Jésus, « regardant vers le ciel, [il]
soupira2 et lui dit : ouvre-toi ! » (Marc 7.
32-35). Il est parfois pénible de vivre en ce monde déchu. Notre cher
Seigneur a également senti cela.
Quand un groupe de
personnes est grand, et que les besoins sont encore plus grands, nous
pouvons devenir insensibles et réagir avec indifférence. Le Seigneur
était fatigué. Il a essayé de s’éloigner avec ses disciples vers un
endroit silencieux et de prendre un peu de repos. Ils le méritaient.
Pourtant une grande foule les a retrouvés. Jésus pouvait-il voir dans la
foule quelques visages qui hurleraient plus tard « crucifie-le » ? Le
Seigneur ne savait-il pas qu’on ne peut pas faire confiance aux foules
? Ne se rendait-il pas compte que beaucoup avaient suivi par curiosité
et pour leur profit personnel ? Pourtant, que lui est-il monté au cœur
en voyant la foule ? « Et il fut ému de compassion envers eux,
parce qu’ils étaient comme des brebis qui n’ont pas de berger »
(Marc 6. 31-34). Il a senti leur besoin spirituel et matériel. Quand il
a eu affaire à une autre grande foule, il avait expliqué à ses disciples
: « Je suis ému de compassion envers la foule, car voici trois
jours déjà qu’ils demeurent auprès de moi, et ils n’ont rien à manger ;
et si je les renvoie à jeun dans leurs maisons, ils tomberont
en défaillance par le chemin » (Marc 8 : 2,3). Il y a quelques mois j'ai
prêté à une sœur ici en Arménie un commentaire sur les Éphésiens écrit
par un auteur occidental. Après quelques semaines je lui ai demandé ce
qu'elle en avait pensé. « J'ai été découragée par ce livre » m’a-t-elle
dit. « Pourquoi ? », lui ai-je demandé, surpris. « Il m'a donné
l'impression que nos bénédictions sont toutes dans les cieux et promises
pour la vie future. Ce Christ ne s’inquiète pas de savoir que nous
sommes en retard sur le paiement du loyer, que nos boulangers ont arrêté
de nous faire crédit, que mon fils est malade au lit. Nous avons aussi
besoin de la bénédiction du Seigneur aujourd’hui ! » Passez-vous
actuellement par une étape difficile de la vie ? Le Seigneur sait ce que
sont la douleur, les frustrations, et les injustices de la vie dans
notre monde déchu. Son cœur est rempli de compassion et il
comprend parfaitement chacun de nos besoins.
2. La
réaction de Jésus face à l’asservissement [démoniaque] spirituel
L'évangile de Marc est un
évangile d'action. Il nous présente Jésus en mouvement. Mais chaque
action engendre une réaction. Nous y trouvons l'opposition au Seigneur
et à son œuvre dans chacun des 16 chapitres, excepté celui du chapitre
prophétique (13). Cette opposition est venue fondamentalement de deux
sources : l’activité satanique et les technocrates religieux juifs. Dans
9 chapitres, diverses références sont faites aux démons, aux esprits
immondes ou à Satan. L’évangile de Marc nous décrit plus d'activités
démoniaques que les autres évangiles. Nous y trouvons Satan tentant
Jésus, prenant la parole au travers de cœurs endurcis et s’exprimant au
travers de Pierre. Nous lisons au sujet d’esprits impurs, qu’ils
parlaient, criaient, secouaient des personnes, jetaient une personne à
terre en grinçant des dents, rendaient muet, sec et violent et
déchiraient les hommes avec une force extraordinaire. L’évangile de Marc
fait référence à des démons possédant un homme (5. 8), une femme (16.
9), un enfant (9. 21), un lieu (5. 10), des animaux ( 5. 13). Le
Seigneur chasse parfois les esprits immondes à distance (7. 29), parfois
face à face après un dialogue avec eux (5. 8). Certains esprits immondes
peuvent parler (1. 34), certains ont un nom et une volonté qui leur est
propre (5. 9,12).
Vous ne connaissez
peut-être pas très bien tous ces signes étranges et explicites
d’asservissement satanique. Beaucoup de chrétiens civilisés et cultivés
ont développé des modèles théologiques visant à limiter à un passé
lointain ces phénomènes qui mettent mal à l'aise. Mais beaucoup de ces
phénomènes sont encore manifestes aujourd'hui dans les cultures
païennes. Avec la migration actuelle rapide des populations du
tiers-monde vers l'Amérique du Nord et l'Europe, je pense que n'importe
quel groupe chrétien, qui s'engage sérieusement dans l’évangélisation et
l’aide aux émigrants, rencontrera sous peu une activité étrange
semblable. C’est seulement quand vous gagnerez leur confiance qu’ils
commenceront à en parler. Qu’est ce que cela vous fait ?
êtes-vous motivé par ce
nouveau défi ? êtes-vous
effrayé d’aller à la rencontre de l'inconnu ?
êtes-vous furieux de
devoir remettre en question votre "confortable" cadre théologique?
êtes-vous nerveux face
au danger personnel possible ?
Comment notre Seigneur
Jésus s'est-il senti ? Il ne s'est pas concentré sur lui-même. Il ne
s'est pas concentré sur les esprits immondes. Il a « usé de
miséricorde » envers l'homme démoniaque (5. 19). Le ministère de
Christ pour libérer ceux qui étaient asservis par les démons n'est pas
passé inaperçu. Certains l'ont appelée une « doctrine nouvelle » ou «
enseignement nouveau » (1. 25-27). D'autres qui ne pouvaient pas en nier
les effets positifs mais qui ne voulaient pas avoir à faire à toutes ces
affaires confuses ont affirmé que Christ lui-même avait un esprit
immonde (3. 22,30). Cependant, ceux qui avaient vécu l’agonie d’un tel
asservissement se sont rassemblés autour de Jésus (1. 32-34). Avec mon
expérience limitée dans ce domaine, je pense que la miséricorde
doit être la force motrice pour s’investir dans ces problèmes (et non
pas la curiosité, ni l’amour de la polémique). En fait, sans un
sentiment profond de miséricorde pour une personne qui souffre de
manière évidente d’un tel asservissement, très peu de gens tenteront de
s’investir ou d’aider. Le processus, qui consiste à aider ceux qui
souffrent d’un tel assujettissement de l’esprit à trouver la pleine
liberté en Christ, n'est pas toujours aisé.
3. La
réaction de Jésus face aux technocrates religieux
Nous trouvons une large
représentation de la vie religieuse juive dans cet évangile. L’évangile
de Marc mentionne des sacrificateurs et des principaux sacrificateurs,
des Pharisiens et des scribes, des Sadducéens, des anciens et des
Hérodiens.
Chacun avec son point de
vue théologique différent, mais bel et bien unis dans leur opposition à
Jésus. Au début de l'évangile l'opposition est principalement
théologique, examinant et jugeant Jésus sur des questions telles que :
qui peut pardonner les péchés (2. 7), pourquoi Jésus a-t-il mangé avec
les pécheurs (2. 16), pourquoi ses disciples ne jeûnaient-ils pas (2.
18), et qu’est-il permis et qu’est-il interdit de faire pendant le
Sabbat (2. 24). Un jour de Sabbat, Jésus s’est trouvé devant un homme
malade. Jésus aurait-il attendu un jour de plus avant de le guérir pour
éviter une confrontation inutile avec les juifs inflexibles ? Jésus ne
nie pas que la loi du Sabbat ait été donnée par Dieu, mais il s'est
référé à la raison de cette loi : « Le sabbat a été fait pour l’homme,
non pas l’homme pour le sabbat » (2. 27). Est-il permis de faire du bien
le jour de sabbat ? de sauver la vie ? Les Juifs ont gardé le silence.
Qu’a pensé Jésus de l'attitude de ces technocrates religieux qui se
croyaient justes ? Jésus « les ayant regardés à l’entour avec colère,
[était] attristé3 de l’endurcissement de leur
cœur » (3. 5). Ce
sont des sentiments très forts. Puis, c’est devant leurs yeux
désapprobateurs qu’il a procédé à la guérison de cet homme.
Les Pharisiens se sont
sentis menacés par le comportement provocant du Seigneur. Ils se sont
unis aux Hérodiens (l'aile politique des Juifs religieux) et « tinrent
conseil contre lui pour le faire périr » (3. 6). L'élimination des
non-conformistes est une réponse courante des technocrates religieux
contrariés.
L'opposition s’est accrue.
Ils ont commencé à discréditer la personne du Seigneur : ils l'ont
accusé d’être possédé par Belzébul (3. 22). Ces technocrates religieux
ont suivi Jésus partout avec dans une main la loi donnée par Dieu et
dans l’autre leurs bonnes traditions (« nous l'avons toujours fait de
cette façon ») et analysant tout ce que Jésus faisait, disait ou
permettait. Un jour, quelques-uns uns des disciples de Jésus ont
commencé à manger sans se laver les mains. Naturellement c'est une bonne
idée de se laver les mains, mais pour les technocrates c'était devenu
une loi. L’évangile de Marc consacre 23 versets (7. 1-23) pour expliquer
la pensée de Jésus : tout ce qui vient du dehors ne pourra jamais
souiller le croyant. Ce sont les mauvaises choses du dedans d'une
personne (dans le cœur des hommes) qui la souille. La réalité
intérieure est toujours plus importante que l'apparence extérieure. Les
scribes ont alors essayé d'employer la prophétie pour critiquer Jésus :
« il faut qu’Élie vienne premièrement ». Puisque Élie n'est pas encore
venu, Jésus ne peut pas être le Christ (9. 11, 12). Vient ensuite
l'argument institutionnel : À Jérusalem ils lui ont demandé « Par quelle
autorité fais-tu ces choses, et qui t’a donné cette autorité pour faire
ces choses ? » (11. 27,28). Les principaux sacrificateurs étaient les
descendants d'Aaron, une lignée d’autorité ordonnée par Dieu. Mais qui
est ce Jésus ? Un fervent indépendant ? Un gourou indépendant ?
Recherchant des preuves
pour juger et accuser Jésus, ils l'ont interrogé sur le divorce (10. 2)
et lui ont demandé s’il était permis de payer l’impôt à César qui était
païen (12. 14). Je suis sûr que les questions n’ont pas dérangé le
Seigneur. C'était leur attitude hypocrite à juger qui l'a contrarié. Ils
avaient décidé que Jésus n'était pas le Christ, et aucun témoignage
contraire ne les aurait fait changer d’avis. Au lieu d'être
reconnaissants et de se réjouir quand Jésus a rassasié les 4000, « les
pharisiens sortirent et se mirent à disputer avec lui, demandant de lui
un signe du ciel, pour l’éprouver ». « Et, soupirant profondément
en son esprit » Jésus refusa de leur donner un signe. « Et les laissant,
il remonta de nouveau dans la nacelle et s’en alla à l’autre rive » (8.
11-13). Jésus a tenu tête aux Pharisiens puis il a pris ses distances.
C’est peut-être un exemple instructif sur la façon dont ceux qui suivent
le Seigneur devraient se comporter avec les technocrates religieux
obstinés.
Un état d’esprit légaliste
est contagieux. Les technocrates religieux se congratulent l’un l’autre
et remercient le Seigneur de ce qu'ils ne sont pas aussi laxistes que
les autres. C'est un club d’individus satisfaits d’eux-mêmes qui se
sentent obligés d’aller et venir, comme les Pharisiens, « pour éprouver
» les autres. A bord du bateau, Jésus a mis en garde ses disciples
contre cette moisissure parasite et unicellulaire à fort développement :
« gardez-vous du levain des pharisiens » (8. 15). Nous devrions
également prendre cet avertissement au sérieux.
4. La
réaction de Jésus face à un homme recherchant sincèrement le salut
Alors que Jésus quittait la
région de la Judée, un jeune homme accourut jusqu'à lui. Ce jeune homme,
comme les Pharisiens et les scribes, avait également quelques questions
à poser à Jésus. Mais son cœur était différent. Il a demandé à
apprendre et non pas à éprouver, juger ou rivaliser. Tout comme les
Pharisiens, il s’était conformé à la loi depuis sa jeunesse. Il émanait
de lui une volonté d’obéir dirigée par un cœur sincère. Notre Seigneur
Jésus avait repéré cette différence importante. Le Seigneur avait
ressenti de la colère et une profonde tristesse envers les Pharisiens,
mais quant à ce jeune homme : « Jésus, l’ayant regardé, l’aima ».
Doucement le Seigneur l'a informé de l'état déficient de son cœur : il
y avait en lui de la sincérité mais pas de besoin. Sa recherche était
dépourvue du sentiment aigu de ses besoins. Son obéissance aux formes
extérieures de conduite ordonnées par Dieu avait endormi sa soif des
réalités.
Une grande partie de la
sécurité de ce jeune homme et de son amour-propre reposait sur ses
économies, sa ferme, ses valeurs mobilières et son plan de retraite. «
Vends tout ce que tu as et donne aux pauvres », le Seigneur lui a
expliqué « et viens, suis-moi » (10. 17-22). Le message est clair :
garder des règles et suivre des traditions conjugués à un certain degré
de renoncement peuvent faire qu’une personne soit satisfaite
d’elle-même, mais le Seigneur cherche quelque chose de plus profond. La
passion qui anime notre cœur, c’est ce qui importe vraiment, et une
passion orientée vers Dieu sera disposée à tout donner.
Deux chapitres plus loin,
Jésus fait une heureuse rencontre avec un scribe qui réfléchit. Le
scribe avait demandé à Jésus : « Quel est le premier de tous les
commandements ? » Dans le dialogue qui a suivi, il est devenu évident
que ce scribe particulier était différent de la plupart de ses amis
religieux. Derrière les formes extérieures de spiritualité de la loi, il
reconnaissait la suprématie d’une réalité spirituelle. « Tu aimeras le
Seigneur ton Dieu de tout ton cœur … et d’aimer son prochain comme
soi-même, c’est plus que tous les holocaustes et les sacrifices ». Je
suis sûr que le Seigneur l’a regardé et l’a, lui aussi, aimé
quand il lui a dit amicalement : « Tu n’es pas loin du royaume de Dieu »
(12. 28-34).
Malheureusement, comme la
plupart des Pharisiens, nous sommes enclins à défendre et exalter les
apparences extérieures et les procédures. Les structures et les
traditions nous rassurent. Elles assurent une certaine continuité et,
certains pourraient le croire, donnent une preuve visible de
spiritualité. Jésus avait mis en garde ses disciples au sujet de cette
importance stricte accordée aux apparences « Gardez-vous des scribes,
qui se plaisent à se promener en longues robes (soucieux du code
vestimentaire), et [qui aiment] les salutations dans les places
publiques (soucieux du protocole, de leur statut, de la manière d’agir
et de parler), et les premiers sièges dans les synagogues (soucieux de
leur autorité et de la place où ils sont assis – sur des chaises ou des
bancs, en cercles ou en carrés, les hommes ici et les femmes là) et les
premières places dans les repas (soucieux de leur nom de famille, leur
position et leur influence) ; qui dévorent les maisons des veuves (en
effrayant et en imposant leurs manières d’agir aux foyers faibles), et
pour prétexte font de longues prières (en utilisant des termes bibliques
et revendiquant agir pour Dieu » (12. 38,39). Le
nouveau testament nous
recommande en effet quelques exemples et principes de conduite à suivre
en accord avec la nouvelle vie en Christ. Mais mon cher ami croyant, ne
soyons jamais satisfait d’une apparence extérieure, aussi conforme à la
Bible soit-elle. Notre passion continuelle devrait être celle de
l'apôtre Paul : « Car mon but est de le connaître – que je le connaisse
d’une manière de plus en plus profonde et personnelle, saisissant
toujours plus fortement et reconnaissant toujours plus clairement les
grandeurs de sa Personne » Philippiens 3. 10 (traduction amplifiée).
Encore aujourd’hui Jésus aime ceux qui le recherchent d’un cœur
sincère.
5. La
réaction de Jésus face à une génération incrédule
Je me demande ce que Jésus
a dû ressentir à propos de cette visite nostalgique à Nazareth, sa ville
natale. Beaucoup de souvenirs et d’émotions ont dû lui revenir quand il
est passé à côté du puits du village, de la place du marché, de visages
bien connus... Le jour du Sabbat il est entré dans la synagogue qu’il
connaissait si bien et il a commencé à enseigner. Pour l’avoir connu
depuis qu'il était un jeune garçon, les gens du pays ont été étonnés par
les paroles de Jésus, sa sagesse et le fait qu'il pouvait même faire des
miracles. Il leur était difficile de faire le lien entre l'humain et le
divin. Ils ont absolument voulu remettre Jésus dans leur contexte
familier : « Celui-ci n’est-il pas le charpentier, le fils de Marie, et
le frère de Jacques ... et ses sœurs ne sont-elles pas ici auprès de
nous ? » Il y a quelque chose de semblable actuellement dans notre
culture séculaire et moderne : nous avons du mal à faire le lien entre
le monde matériel et le monde spirituel. Même nous les chrétiens,
particulièrement chez les occidentaux instruits, nous avons en ceci un
réel problème. Nous croyons qu’il existe véritablement un monde matériel
et un monde spirituel, mais nous désirons les maintenir constamment
distincts. La sphère où le matériel et le spirituel se rencontrent, est
pour nous problématique, celle où le visible et l’invisible agissent
ensemble.
Nous sommes heureux de
passer des heures à étudier la bible, à organiser des réunions, à
établir des tableaux prophétiques, à chanter et à donner des
enseignements sur les relations du passé entre Dieu et les hommes. Mais
réaliser l’existence d’un dialogue de Dieu avec nous aujourd'hui est une
chose plus difficile.
Ceux de Nazareth ne
pouvaient pas envisager dans leurs esprits la possibilité que leur
charpentier soit vraiment le Messie Divin. Qu’est-ce que le Seigneur
Jésus a pensé de cela ? Dans d'autres villes, les gens amenaient leurs
malades pour qu'il les guérisse. Mais très peu l’ont fait à Nazareth.
Nous lisons que Jésus « s’étonnait de leur incrédulité » (6.
1-6). Il s'attendait à quelque chose de différent de la part de ceux qui
attendaient un Messie. Jésus s'attendait à quelque chose de différent de
ceux qui se glorifiaient d’adorer le seul vrai Dieu, le Dieu des
miracles et des merveilles. Votre foi envisage-t-elle vraiment que Dieu
puisse faire quelque chose dans votre monde matériel aujourd'hui ?
En comparant les
rassemblements chrétiens en Europe et Amérique latine, je note qu'ici,
les réunions de prières du milieu de semaine sont plus suivies que les
réunions d'étude de la Bible. En Europe c'est fréquemment l'opposé.
Certaines cultures ont un sens plus profond du besoin et un désir plus
fort que Dieu agisse sur leur réalité. La plupart des prières
d’intercessions sont très clairement exprimées : « Seigneur, j’ai besoin
d’un travail ». « S’il te plait Seigneur, guéris ma femme ». « Hier j'ai
partagé ma foi avec un ami au travail, Seigneur convertis-le ». C’est
une espérance vivante et pressante que Dieu fera réellement quelque
chose. De telles prières sont d’un enthousiasme contagieux. Luc nous dit
que Jésus a admiré4 la « si grande foi » du
centurion (7. 9). Qu’est-ce que Jésus pense de notre foi ?
6. La
réaction de Jésus face à un comportement exclusif
Nous avons probablement
tous une idée de ce que devrait être le christianisme, ce qui est
acceptable et ce qui ne l’est pas. Certains de nos points de vue et de
nos attentes sont fermement basés sur La Parole, d’autres ne sont basés
que faiblement sur La Parole, et d’autres sont simplement le reflet de
notre environnement social, ce que nous aimons et ce que nous n’aimons
pas du fait de notre expérience personnelle ou collective. Dans la
pratique, il est parfois difficile de séparer ces trois points de vue.
La plupart des traditions religieuses ont des origines louables, mais le
grand danger est de leur donner autant d’importance qu’à La Parole.
Comme nous l’avons vu, les Pharisiens avaient un état d’esprit
extrêmement exclusif. Mais nous, les humains, sommes enclins à être
comme ça. Cela nous rassure et nous donne la sensation d’être dans le
droit chemin alors que les autres sont « en dehors ». Ce comportement
exclusif apparaît très tôt dans la vie : avez-vous remarqué ce
comportement méchant et exclusif chez certains enfants à l'école ?
Les disciples aussi avaient
leur petite idée sur « qui pouvait faire quoi » et sur qui pouvait
s’approcher de Jésus. Jean était venu à Jésus avec enthousiasme et lui
avait raconté comment il avait repéré et empêché une personne qui ne
faisait pas partie des douze disciples de chasser les démons au nom de
Jésus. On a l'impression que Jean s'était attendu à ce que Jésus le
félicite et lui dise « Bien, bon [serviteur], … tu as été fidèle ».
Pourquoi Jean avait-il empêché cet homme de continuer ? « parce qu’il ne
nous suit pas ». Jésus n'a pas été d'accord avec le comportement
autoritaire et exclusif de Jean et il l’a repris promptement : « Ne le
lui défendez pas car celui qui n’est pas contre nous est pour nous » (9.
38,39).
Au chapitre suivant nous
trouvons les disciples arrêtant un autre groupe de personnes, ceux qui
apportaient leurs enfants à Jésus. Pour les disciples, les enfants
bruyants et joyeux accompagnés de leurs mamans enthousiastes les
dérangeaient vraiment. Les disciples appréciaient les enseignements
profonds de Jésus qui stimulaient leur intellect. Qui aurait pu se
joindre à eux ? Les personnes sérieuses et spirituelles bien sûr, celles
qui craignaient Dieu, qui aimaient La Parole et ses enseignements. Et
manifestement pas ces enfants immatures. Ils ne pouvaient pas comprendre
la théologie. Ils n’étaient même pas intéressés par leurs débats
doctrinaux. Tout ce qu’ils voulaient c’était que Jésus les touche et les
bénisse. Les disciples reprenaient ceux qui s’approchaient. Qu’a pensé
Jésus de ce désolant spectacle ? A-t-il été frustré par cette
interruption de son discours sur le divorce ou contrarié parce qu’il
avait perdu le fil de sa pensée ? Non. « Jésus, voyant [cela], en fut
indigné ». Non pas à cause de ceux qui voulaient qu'il les touche et
qu’il les bénisse, mais contre ses disciples qui voulaient les en
empêcher. Je pense que beaucoup de ces personnes qui écoutaient ont dû
oublier ce que Jésus a enseigné sur le divorce, mais je suis sûr que les
familles n'ont jamais oublié ces moments précieux : « les ayant pris
entre ses bras, il posa les mains sur eux et les bénit » (10. 13-16).
Rencontrer Jésus, être avec Jésus, c'est l'essence du christianisme.
7. La
réaction de Jésus face au prix de notre rédemption
L'auteur de l’épître aux
Hébreux nous encourage « à fixer les yeux sur Jésus, le chef et le
consommateur de la foi, lequel, à cause de la joie qui était devant lui,
a enduré la croix » (Hébreux 12. 2). Jésus pouvait anticiper avec joie
le fruit de ses souffrances. On peut s’étonner que cette joie divine
soit suscitée dans les cœurs de personnes rachetées, bizarres,
problématiques et inconséquentes comme vous et moi. Mais qu'est-ce que
Jésus a ressenti face à la douleur et à la réalité de la croix ? « Et
ils viennent en un lieu dont le nom était Gethsemané. Et il dit à ses
disciples : Asseyez-vous ici, jusqu’à ce que j’aie prié. Et il prend
avec lui Pierre et Jacques et Jean, et il commença à être saisi
d’effroi et fort angoissé. Et il leur dit : Mon âme est
saisie de tristesse jusqu’à la mort »(14. 32-34). Pierre pourra t-il
jamais oublier cette scène ? Il n'avait jamais vu le Seigneur comme ça
avant. Combien de fois a t-il dû raconter cette histoire à Jean Marc
quand ils voyageaient ensemble !
Peut-être que ceux d’entre
nous qui ont été élevés dans des maisons chrétiennes, et qui ont entendu
l’histoire de la passion du Christ à maintes reprises, sont devenus
insensibles au degré de douleur dont il est question ici. Nous pouvons
être tentés de penser que puisque Jésus est Dieu, et que Dieu peut tout
faire sans beaucoup d'effort, le salut a été une chose facilement
acquise. Mon ami croyant, n’avez-vous jamais été blessé ? N’avez-vous
jamais été rejeté ? Avez-vous été affligé, profondément affligé ? Tout
cela, et beaucoup plus encore, a été enduré par Christ pendant qu’il
nous rachetait. Imaginez juste pendant un moment Jésus Christ « saisi
de tristesse jusqu’à la mort ». Et c'était juste le commencement.
Pour vous et pour moi il a été plus loin. Voici à quel point il nous
estime ! Peut-être que cet aperçu du cœur de notre Sauveur béni nous
aidera à l'aimer davantage et à estimer davantage un si grand salut. «
N’est-ce rien pour vous tous qui passez par le chemin ? Contemplez, et
voyez s’il est une douleur comme ma douleur qui m’est survenue ? »
Lamentations 1. 12.
Conclusion
Le Seigneur n'a pas oublié
le temps qu’il a passé sur la terre. « Car, en ce qu’il a souffert
lui-même, étant tenté, il est à même de secourir ceux qui sont tentés »
(Hébreux 2. 18). Nous avons un Seigneur qui comprend ce que nous
ressentons, qui connaît la douleur de vivre les conséquences du péché
des autres, et les frustrations de vivre dans un monde déchu. Pourtant
il y a plus que ça. Au fur et à mesure que nous suivrons Christ dans
notre manière de penser (la pensée de Christ), nous commencerons
également à éprouver les sentiments qu’il a exprimés : sa compassion
envers les nécessiteux, sa miséricorde envers ceux qui
souffrent de l'oppression des démons, son amour envers ceux qui
le recherchent sincèrement, son indignation vis-à-vis des
comportements exclusifs et peut-être même sa colère contre nos
propres attitudes et nos pratiques de Pharisiens. Si nous pouvions
toujours plus penser et ressentir les choses comme Christ, nous nous
comporterions davantage comme Lui. C'était le but du ministère de
l'apôtre Paul : « Mes enfants, pour l’enfantement desquels je travaille
de nouveau jusqu’à ce que Christ ait été formé en vous. » Galates 4. 19.
________________
Notes :
-
Dans la traduction, à de rares exceptions près,
nous avons remplacé « Christ » par « le Seigneur » qui est plus
couramment employé en français.
-
La plupart des versions anglaises traduisent par
"soupira profondément"
-
Le sens de l'original est "affligé" ce qui en
anglais est rendu par "profondément attristé"
-
En Anglais, les verbes "s'étonner"de Marc 6.6 et
"admirer" de Luc 7.9 sont rendus par le même "be amazed"