Philip Nunn
Londres, Angleterre
1994
Il existe un certain nombre de choses que vous ne pouvez pas faire tout
seul. La lune de miel en est une. Et vous ne pouvez pas non plus être
une équipe de foot ou une famille à vous tout seul. Cela est aussi vrai
dans la famille de Dieu, l’Église. Il n’a jamais été dans l’intention de
Dieu que quelqu’un vive sa vie chrétienne tout seul. Au contraire, nous
devons vivre comme faisant partie de la famille de Dieu. Un certain
nombre de passages du Nouveau Testament concerne explicitement ces
relations au sein de l’Église, et peut être identifié par un mot grec
habituellement traduit par « l’un l’autre » ou « les uns les
autres ». Ce mot apparaît plus de 70 fois. Il s’applique à des
chrétiens, et les incite à exprimer leur communion de manière très
pratique. Chaque Chrétien est appelé à vivre ces versets mentionnant « les
uns les autres ». Nous considérerons ici trois de ces appels :
1.
Nous sommes appelés à nous aimer l’un l’autre
C’était au cours du dernier repas. Le Seigneur achève de dire à ses
disciples qu’il va bientôt retourner auprès de son Père, et il leur
donne un nouveau commandement : « que vous vous aimiez l’un l’autre ;
comme je vous ai aimés, que vous aussi vous vous aimiez l’un l’autre ».
Puis il ajoute : « À ceci tous connaîtront que vous êtes mes disciples »
(Jean 13 : 34-35)
Remarquons que le Seigneur ne leur communique pas ‘une nouvelle
suggestion’ ni ‘une bonne idée’. C’est un nouveau commandement, pas une
option. Mais en quoi est-il nouveau ? Auparavant, les israélites avaient
reçu de Dieu le commandement sans équivoque « tu aimeras ton prochain
comme toi–même. » (Lévitique 19 : 18). Mais le commandement du Seigneur
à ses disciples change le niveau de référence : ce n’est plus « tu
aimeras ton prochain comme toi–même », mais « comme je vous ai aimés,
que vous aussi vous vous aimiez l’un l’autre ». Rendez-vous
compte ! Notre nouveau modèle est l’amour de Jésus lui-même !
Le Seigneur présente cette qualité d’amour comme un test devant « tous1
» pour savoir si oui ou non nous sommes ses disciples. Nous aimerions
penser que nous pouvons prouver notre qualité de disciple par la mise en
place de divers programmes ecclésiastiques intéressants, par une louange
enthousiaste, par la profession de doctrines correctes, ou peut-être par
la référence à certains conducteurs ou mouvements historiques
Sans diminuer l’importance d’une adoration sincère et en tenant ferme la
vérité révélée, il faut accepter la force de la parole de Jésus : « À
ceci tous connaîtront que vous êtes mes disciples, si vous avez de
l’amour entre vous2 ». Est-ce que j’aime mes frères et
sœurs en Christ ? Suis-je marqué de ce poinçon attestant de ma vraie
qualité de disciple ?
Malheureusement, il arrive parfois que nous nous critiquons les uns les
autres –sa tenue vestimentaire, sa façon de s’exprimer, de chanter, sa
manière de prêcher … ou alors, nous répandons des rumeurs non confirmées
qui démolissent d’autres personnes. Rien de ceci n’est nouveau. Paul
avertissait les chrétiens de Galatie : « Mais si vous vous mordez et
vous dévorez l’un l’autre, prenez garde que vous ne soyez
consumés l’un par l’autre. » (Galates 5 : 15). À notre époque
marquée par l’individualisme et l’indifférence, Dieu nous appelle à nous
aimer les uns les autres d’un amour inconditionnel. Quelles sont les
caractéristiques d’un tel amour ?
v
La tolérance
Paul exhortait les croyants d’Éphèse à marcher « avec toute humilité et
douceur, avec longanimité, vous supportant l’un l’autre dans
l’amour » (Éphésiens 4 : 2). Pourquoi nous est-il demandé de nous
supporter l’un l’autre ? Simplement parce que c’est nécessaire. Ce
serait merveilleux si nous étions tous des êtres humains mûrs,
raisonnables, humbles, pleins de considération et aimables. Mais parfois
nous sommes fatigués, ou égoïstes, ou irréfléchis, ou immatures. En
conséquence, l’amour nous demande d’être tolérants dans nos
comportements les uns envers les autres, non que nous ne nous
préoccupions pas du péché ni de la vérité, mais parce que nous devons
obéir au commandement du Seigneur.
v
Le respect
En tant que chrétiens, nous disons parfois des choses insensées, et
faisons parfois pire. Nous sommes tous humains et enclins à agir de
manière charnelle. Et pourtant même dans ces circonstances, les
Écritures nous enseignent à nous respecter l’un l’autre : « étant soumis
les uns aux autres dans la crainte de Christ » (Éphésiens 5 :
21). Nous devons nous aimer et nous respecter mutuellement par révérence
à l’égard de notre cher Sauveur.
v
La sollicitude
En comparant l’église à un corps, Paul conclut « que les membres aient
un égal soin les uns des autres. Et si un membre souffre, tous les
membres souffrent avec lui. » (1 Corinthiens 12 : 25-26). Un amour
chrétien sincère ne peut s’exprimer que dans une sollicitude
authentique. Suis-je réellement concerné lorsque mon frère perd son
travail ? Lorsque ma sœur tombe malade ? Lorsqu’une nouvelle personne
arrive dans le voisinage ou vient visiter l’église locale ?
2.
Nous sommes appelés à nous pardonner l’un l’autre
Une bonne partie de la notice explicative d’un ordinateur est consacrée
aux pannes –comment identifier et corriger des erreurs ou des mauvais
fonctionnements possibles. Les relations humaines sont beaucoup plus
complexes et délicates que les ordinateurs. Il y a tellement plus de
choses qui peuvent aller mal. Nous avons des goûts, des éducations et
des convictions différents. En plus de cela, nous sommes parfois
fatigués et manquons de patience. C’est pour cela que nous sommes
exhortés à nous pardonner l’un l’autre. Garder un grief contre un frère
croyant (peu importe qui est en tort) est un péché. Éphésiens 4 : 31-32
nous dit : « Que toute amertume, et tout courroux, et toute colère, (…)
soient ôtés du milieu de vous (…) mais soyez bons les uns envers les
autres, compatissants, vous pardonnant les uns aux autres comme Dieu
aussi, en Christ, vous a pardonné. »
Que devons-nous faire lorsque nous péchons l’un contre l’autre ? Juste
pardonner et oublier ? Est-ce que ça ne favorise pas l’injustice ? il y
a certains domaines, comme nos pensées, où nous n’offensons que Dieu. À
d’autres moments, nous devons reconnaître avec le fils prodigue que nous
avons péché contre le ciel et également contre quelqu’un d’autre (Luc
15 : 21). Dans de tels cas, il faut rétablir les choses avec Dieu et
l’autre personne. Si un frère pèche contre moi et ne semble pas s’en
soucier, je dois lui pardonner, non parce qu’il le mérite, mais parce
que j’ai le commandement de le faire. Cela soulage mon cœur et me libère
pour adorer et servir. Si l’autre personne ne se repent pas, c’est un
problème entre lui et le Seigneur.
Matthieu 18 explique ce que nous devons faire en pratique pour maintenir
la justice dans notre rassemblement local. Tout d’abord, rencontrer le
frère seul. S’il n’écoute pas, prends un ou deux autres avec toi. S’il
n’écoute toujours pas, implique l’assemblée. S’il refuse toujours, le
rassemblement local doit agir. Remarquons qu’il nous faut d’abord voir
le frère qui a offensé et lui parler en privé. Beaucoup de problèmes
pourraient être résolus facilement et clairement si seulement nous
suivions l’enseignement de Jésus à ce sujet.
Ma responsabilité personnelle est de pardonner : « vous supportant
l’un l’autre et vous pardonnant les uns aux autres, si l’un a
un sujet de plainte contre un autre ; comme aussi le Christ vous a
pardonné, vous aussi faites de même. » (Colossiens 3 : 13). Dans des
jours marqués par les conflits et les problèmes entre personnes, Dieu
nous appelle à combattre pour l’harmonie en nous pardonnant les uns les
autres – comme Christ nous a pardonné.
3.
Nous sommes appelés à nous servir l’un l’autre
« Car aussi le fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour
servir » (Marc 10 : 45). La nuit même où Jésus fut livré et mené pour
être crucifié, il a choisi d’enseigner à ses disciples une leçon
inoubliable relative au service. Il « met de côté ses vêtements; puis
ayant pris un linge, il le serra autour de sa taille. Ensuite il verse
de l’eau dans le bassin, et commence à laver les pieds des disciples et
à les essuyer avec le linge dont il était ceint. » Jean 13 : 4-5)
Nous pouvons nous imaginer ce que les disciples ont ressenti. Peut-être
attendaient-ils qu’un des disciples les moins influents continue le
travail. Peut-être que Pierre a pensé « il m’a donné les clés du
royaume ; sans doute quelqu’un d’autre doit se porter volontaire pour
laver nos pieds sales ». Avant de critiquer Pierre, considérons nos
propres pensées indignes : « je suis en communion depuis plus de 10 ans,
laissons l’un des nouveaux-venus faire ce travail barbant. Je l’ai fait
de si nombreuses fois, et personnes ne m’a jamais remercié pour cela. Je
vais arrêter et attendre que quelqu’un d’autre se propose. » Mais
comment le Seigneur a-t-il conclu cette leçon pratique ? « Si donc moi,
le seigneur et le maître, je vous ai lavé les pieds, vous aussi vous
devez vous laver les pieds les uns aux autres ; c’est un exemple que je
vous ai donné » (Jean 13 : 14-15).
L’apôtre Paul a également souligné ce point : « Car vous, frères, vous
avez été appelés à la liberté; seulement n’usez pas de la liberté comme
d’une occasion pour la chair, mais, par amour, servez-vous l’un
l’autre » (Galates 5 : 13). Pour nous servir l’un l’autre, nous
devons garder nos yeux ouverts pour voir les besoins de ceux qui nous
entourent. Nous devons cultiver une réelle sollicitude. Nous devons être
prêts à répondre avec un mot d’encouragement, une visite amicale, un
appel téléphonique ou une lettre. Parce qu’il est si facile de nous
sentir découragés, l’Écriture nous exhorte : « Encouragez-vous donc l’un
l’autre »3 (1 Thessaloniciens 4 : 18). À notre époque
caractérisée par l’apathie et le repliement sur soi-même, Dieu nous
appelle à nous servir l’un l’autre.
Conclusion
L’apôtre Jean était un vieil homme lorsqu’il a écrit ces trois dernières
épitres qui portent son nom. Ses écrits ont la saveur de son expérience
personnelle du premier demi siècle de l’histoire de l’Église –des temps
d’expansion rapide, des temps de persécution, les problèmes internes et
les désaccords, l’hypocrisie de certains, les longs débats doctrinaux,
les nombreux sermons … nous pouvons presque l’entendre dire, avec une
expression pensive sur le visage : « Enfants, n’aimons pas en paroles ni
avec la langue, mais en action et en vérité. » (1 Jean 3 : 18).
Quelle est la sincérité de vos relations avec les autres ? En tant que
chrétiens, nos relations devraient refléter notre appel – et nous sommes
appelés à nous aimer, nous pardonner et nous servir les uns les autres.
Que nous le fassions « en action et en vérité ».